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Le procès

Le Procès

Compte-rendu du Tribunal du Côderet – Dix-huitième de Helgen – Année 1340 – Tyss

Mis en cause : Aerthis, représenté par son père Nagarr ainsi que Hercaleya, représentée par son père Veskeor.

Objet de l’accusation : Vol d’un Nelku avec violence, fuite et mise en danger d’Anater.

Président du Tribunal : Laksyn.

Juges : Neiros, Sanae et Nildin.

Greffiers : Yalma et Seiron.

L’affaire ayant été déclarée de première importance, cinq Conseillers représentant chacun leur parti ont été convoqués.

Pour le parti de la brume : Jemones

Pour le parti de l’eau : Sonelei

Pour le parti de la terre : Estonar

Pour le parti du feu : Dajen

Pour le parti de la cendre : Yneras

Dernier jour d’audience et verdict.

            Le Président du Tribunal rappelle les faits qui se sont déroulés le quatre-vingt-sixième de Taryn de cette année. En début de soirée, Aerthis et Hercaleya se sont introduits avec effraction sur le site du chantier naval de Tyss. Ils ont franchi les barrières et ont été aperçus dans une zone interdite aux citoyens qui ne travaillent pas sur le chantier. Ils ont assommé et ligoté un des artisans présents sur place. Ils se sont ensuite emparés d’un des cinq Nelkus de la flotte Tyssite, ont coupé les amarres et ont pris la mer en direction d’Hyre en suivant le courant nord de l’Ulunys.

            Il est rappelé que les représentants des accusés n’ont nullement nié ces faits tels qu’ils ont été consignés dans le registre du Tribunal. Par ailleurs, les Conseillers de l’Assemblée présents n’ont pas souhaité déposer de recours quant à une possibilité de reporter le jour du jugement.

            Le Juge Nildin rappelle que les procès où tout ou partie des accusés sont absents sont rares, mais que celui-ci relevant de la sécurité d’Anater, il doit donc, selon la loi, aboutir quand même à un verdict. La parole est d’abord donnée à Nagarr, représentant Aerthis.

            Nagarr a pleinement conscience des enjeux et relate les motifs qui ont poussé Aerthis à passer à l’acte. Selon lui, si les architectes navals ont mis des siècles à optimiser les embarcations capables de contrer les forts courants de l’Ulunys sans danger, c’était pour restaurer nos échanges avec les Hyriens. Il est pourtant de notoriété publique que ces derniers n’ont, jusqu’à présent, jamais été très ouverts au commerce avec les Tyssites et que la présence de l’Ulunys semble faire porter leur regard plus au nord. Nagarr déclare qu’Aerthis désirait partager les secrets d’ingénierie du Nelku afin d’améliorer les relations voire de créer des lignes commerciales.

Le Conseiller Yneras rappelle que tout échange avec l’Archipel a été interdit par vote de l’Assemblée, le troisième de Niartus 8621, pour une durée indéterminée. Ceci, pour préserver la pérennité d’Anater, le temps que les Conseillers estiment de la pertinence de nouer de tels liens. Les enjeux commerciaux n’ont pas été jugés profitables, car les Hyriens, forts de l’activité volcanique qui fait remonter à la surface nombre de pierreries et autres minerais précieux qui pourraient intéresser le marché tyssite, possèdent cependant un développement agricole très faible. Néanmoins, les études ont conclu qu’à l’heure actuelle, la seule richesse que les Tyssites pouvaient exporter, à savoir les produits de la terre, ne serait pas rentable sur des échanges à long terme.

La Conseillère Sonelei déclare cependant que le cas du commerce avec Hyre est régulièrement remis à l’ordre du jour, surtout depuis la fabrication des Nelkus et que l’Assemblée se tient prête à toute opportunité qui serait réciproquement profitable. Pour le moment, il est hors de question de traiter avec les Hyriens qui, selon les rapports, disposeraient de surcroît d’une force militaire bien supérieure à celle d’Anater, qui risquerait donc une invasion si Hyre possédait la technologie des Nelkus.

Nagarr annonce qu’il ignorait personnellement ce dernier point, mais qu’il n’a aucune certitude quant au fait que son fils soit dans le même cas que lui. Il en est de même pour Veskeor.

La Juge Sanae émet l’hypothèse que sa fille Hercaleya, de par ses relations avec des aspirants en politique, était au courant des raisons qui poussaient l’Assemblée à agir avec parcimonie sur le cas de l’Archipel. Néanmoins, Veskeor déclare ne jamais avoir eu connaissance des desseins de sa fille et pose la question épineuse de qui a entraîné l’autre dans cette histoire.

Le Président du Tribunal rappelle que, hormis si les violences faites sur l’artisan du chantier naval n’ont été causées que par l’un des accusés, la responsabilité dans cette affaire sera jugée comme bilatérale. Le témoignage reçu n’a pas permis d’identifier s’il y a eu un seul ou deux agresseurs, car l’attaque s’est faite dans le dos et la victime souffre actuellement d’une perte de mémoire suite au coup. Quels que soient les motifs qui ont poussé Aerthis et Hercaleya à voguer vers Hyre, la décision d’avoir embarqué sur l’esquif le plus sûr de la flotte d’Anater pour traverser l’Ulunys met en danger l’ensemble des Tyssites. Le fait qu’ils ne parlent pas l’Ureyen, n’ont que de faibles connaissances en commerce et ne savent pas se battre face à des ennemis entraînés, couplé aux comportements rarement pacifiques des Hyriens, porte à croire que s’ils parviennent à venir à bout de l’Ulunys, leur vie est en danger tout comme la sécurité d’Anater.

            Après consultation des archives, il s’avère que les deux accusés ont bien suivi le cursus obligatoire éducatif jusqu’à la première sphère, indiquant qu’ils ont été sensibilisés à la stabilité d’Anater et de l’importance d’observer la plus grande prudence avec tout échange extérieur, comme il l’a été fait avec les Ondins par le passé. Par ailleurs, il est rappelé que Nagarr et Veskeor ont respectivement été Citoyen Consultatif et Conseiller du parti de la cendre ce qui tend à appuyer le juste cadre qui fut celui des accusés.

            Le Président du Tribunal attire l’attention sur le fait que chercher l’origine de la prise de décision n’est pas à l’ordre du jour et que l’affaire porte uniquement sur les actes accomplis. S’il est admis que les accusés ont enfreint la loi et qu’il faut statuer sur la gravité de la situation, il conviendra à l’Assemblée, en plus du jugement rendu, de prendre les mesures nécessaires afin qu’un incident de ce genre ne se reproduise plus.

            Le Conseiller Estonar promet que l’affaire sera à l’ordre du jour lors des prochaines sessions de l’Assemblée, avec une proposition de renforcement de la sécurité, autour de la zone de mouillage des Nelkus.

            Veskeor demande si, dans l’hypothèse où les Hyriens s’empareraient du Nelkus, ces derniers auraient les connaissances suffisantes pour reproduire le modèle avec la même dextérité que les artisans tyssites.

            Le Conseiller Jemones, qui assure avoir suivi le développement des navires, certifie qu’au vu des informations que l’Assemblée a des Hyriens, l’outillage qu’ils possèdent dans le travail du bois ne permettrait pas d’arriver à un résultat optimal. Néanmoins, cela reste une supposition et il n’est pas exclu qu’ils aient la capacité d’en reproduire à la perfection.

            Le Président du Tribunal soumet aux Conseillers qu’une surveillance accrue des côtes devrait être envisagée, ainsi qu’une réorganisation des forces armées de Tyss, au cas où des Hyriens viendraient à poser pied sur l’île.

            Nagarr rétorque que ce n’est qu’un scénario parmi tant d’autres, et que même si les motivations premières d’Aerthis et Hercaleya étaient de rallier Hyre, il n’y a aucune preuve formelle qu’ils vont y arriver.

            La Juge Sanae affirme que le Tribunal prend effectivement en compte toutes les hypothèses possibles, mais qu’il n’en demeure pas moins que la gravité de l’affaire reste importante, telle qu’elle a été définie lors des précédentes audiences du procès.

            Avant que le Président du Tribunal ne clôture définitivement les débats, le Conseiller Dajen informe l’ensemble des personnes présentes que, quel que soit le verdict final, ce que Aerthis et Hercaleya ont fait pourrait bien déclencher des évènements qui iraient bien plus loin qu’une invasion hyrienne. En effet, mettre fin prématurément à la barrière millénaire qu’était l’Ulunys, va permettre à Anater de s’ouvrir au-delà du monde connu. Si les explorateurs n’ont jamais rien trouvé en voguant au sud ou à l’est de l’île, que ceux qui ont tenté de contourner l’Ulunys ne sont jamais revenus et qu’il existe effectivement des terres au nord de l’Archipel d’Hyre, c’est que les Tyssites sont encore loin de tout connaître de notre monde.

            Le Juge Neiros rappelle que le mystère entourant ce qui semble être un étrange portail antique, découvert il y a plusieurs siècles au nord de Tyss, est également, selon certains érudits, une piste prometteuse pour atteindre de nouvelles contrées.

            Fin de l’audience, le Président du Tribunal et les Juges se retirent pour délibérer.

Jugement rendu par le Président du Tribunal.

Aerthis et Hercaleya sont déclarés coupables de l’ensemble des faits qui leur sont reprochés. À partir de ce jour, tous leurs biens et titres de propriété sont confisqués. De plus, toute candidature qu’ils pourraient présenter pour siéger à l’Assemblée leur sera déclarée comme irrecevable à vie. Ils ne pourront participer aux doléances du Conseil et ne pourront voter pour aucune élection pour les cinq cents prochaines années. Enfin, ils devront s’acquitter de la somme de deux mille pièces d’électrum, couvrant l’ensemble des préjudices et frais de procès. Si la saisie de leurs biens n’atteint pas cette somme, la différence devra être due par les familles des accusés avant Solma.

En foi de quoi et en accord avec la loi, les représentants légaux des accusés, présents aux procès, recevront une sanction allégée qui prendra immédiatement fin à partir du moment où l’accusé respectif sera retrouvé et que la peine ne serait pas entièrement purgée. Nagarr et Veskeor n’ayant fait l’objet d’aucune accusation de complicité dans cette affaire, cette peine correspondra de ce fait au prorata légal d’un dixième du jugement principal. Par conséquent, il est exigé, avec les mêmes délais que pour les accusés, la somme de deux cents pièces d’électrum et une invalidité de toute candidature à l’Assemblée ainsi que du droit de vote pour une durée de cinquante ans. Durant cette période, il leur sera également interdit de se présenter en tant que Conseiller.

L’affaire est désormais mise en demeure et reprendra en cas d’arrestation d’un ou des accusés afin de statuer sur une condamnation d’emprisonnement, en sus des autres sanctions rendues en ce jour.

Fin du procès.